Vendredi 7 septembre, le tribunal correctionnel d’Angers a reconnu un homme coupable d’agression sexuelle sur la personne de Thomas*, un gay angevin.
L’agresseur d’une quarantaine d’années a été condamné à 2 ans de prison, dont 1 an avec sursis, assortis de 2 ans de mise à l’épreuve avec obligation de soins et de travail, et à 5.000 € de dommages et intérêts.
L’identité de l’agresseur sera versée au fichier des auteurs d’agressions sexuelles.
Les faits remontent au soir du 29 mai 2013, non loin de la place Molière, entre la Maine et le cœur de ville d’Angers.
Thomas a été suivi par son violeur jusqu’à son véhicule, alors qu’il sortait d’un sauna gay du centre-ville.
Quai Gambetta, l’homme l’a alors bousculé, coincé contre sa voiture et l’a obligé à lui pratiquer une fellation avec force contrainte.
Après avoir trouvé réconfort et écoute au bar LGBT L’Entre 2, Thomas a déposé plainte au commissariat la nuit même.
Par la suite, il a contacté QUAZAR, le Centre LGBT d’Angers, via TONIC’S, autre association gay et lesbienne locale.
Depuis 5 ans, QUAZAR, également association d’aide aux victimes d’infractions, accompagne et conseille ce gay d’une vingtaine d’années, à l’époque des faits.
Notre pôle juridique l’a mis en contact avec une avocate, Me Mathilde LIVENAIS, qui l’a assisté tout au long de cette très longue procédure.
QUAZAR se félicite de cette reconnaissance du statut de victime en faveur de Thomas, qui va maintenant pouvoir entamer une nouvelle étape de sa reconstruction.
En la matière, une justice restaurative serait plus adaptée pour la victime et l’agresseur.
L’emprisonnement, qui pourra être aménagé, n’apportera pas de solution à l’agresseur quant à la compréhension de son geste pour ne pas le rééditer.
Cette audience du tribunal correctionnel d’Angers n’a pourtant été possible que grâce à la ténacité de Thomas et à sa seule volonté de voir son violeur poursuivi pour qu’il ne récidive pas.
5 ans de procédure : un vrai parcours du combattant
QUAZAR est consterné par le fait que Thomas se soit senti humilié dès les premières heures de l’enquête par des questions et assertions sur un éventuel acte de prostitution de sa part.
Des accusations de mensonge quant à ses déclarations et sous-entendus qui l’ont profondément choqué.
Pourtant la victime ne faisait que regagner son véhicule stationné non loin de la place de La Rochefoucauld, lieu de drague gay d’Angers.
Une enquête doit pouvoir être diligentée, normalement, sans accabler psychologiquement la victime qui vient de subir un viol.
QUAZAR regrette que les services du procureur d’Angers aient classé sans suite la première plainte de Thomas, sans se donner plus de peine.
Une pratique procédurale très troublante et courante dans d’autres affaires que nous suivons sur Angers.
Ce classement sans suite a obligé Thomas à endurer des années supplémentaires de procédure.
Il a dû déposer une nouvelle plainte avec constitution de partie civile près le doyen des juges d’instruction pour que son affaire soit relancée.
L’instruction qui s’en est suivie a permis de faire émerger les éléments de vérité inhérents à cette affaire.
Elle a conforté les déclarations de Thomas, qui est toujours resté constant et qui n’a jamais surenchérit les accusations portées à l’encontre de son violeur.
En matière de viol, les gays sont des femmes comme les autres
QUAZAR regrette que la victime ait dû céder, malgré un premier refus, à la correctionnalisation des poursuites.
Plutôt que son affaire soit appelée pour viol devant les assises (crime), la victime a dû se contenter d’une simple agression sexuelle (délit) devant le tribunal correctionnel pour échapper à une menace de non-lieu.
Elle a dû accepter que la gravité des faits subis soit minimisée par l’institution judiciaire, pour tenir son objectif : obtenir une condamnation de son violeur.
Une tendance actuelle de la justice, dénoncée par nombre d’associations de protection des femmes victimes de viols, la voix de QUAZAR s’y ajoutant.
Les faits étaient pourtant suffisamment caractérisés dans le cas de ce gay angevin pour que le tribunal prononce une condamnation qui a suivi en tous points la réquisition du ministère public.
Le même ministère public qui classait sans suite la première plainte de la victime 5 ans auparavant !
La circonstance aggravante d’homophobie, c’est à dire la commission des faits à raison de l’orientation sexuelle de la victime, n’a pas été retenue dans cette affaire.
L’agresseur s’est présenté à l’audience comme ayant des relations sexuelles avec des femmes et des hommes, sans jamais se définir bisexuel.
QUAZAR n’ayant pas eu accès au dossier durant l’instruction, respectant le secret procédural imposé, n’a pas d’élément pour se prononcer sur ce point.
Aucune récupération
Enfin, QUAZAR, qui a aussi pour objet de venir en aide aux demandeurs d’asile en raison de leur homosexualité, à travers l’action d’un service interne de bénévoles engagés et formés, ne peut qu’être très sensible au statut de demandeur d’asile de l’agresseur, sans que le motif de sa protection subsidiaire ait jamais été évoqué à l’audience.
Pourtant, citoyen·ne·s, demandeurs d’asile, en matière de relation sexuelle, hétéro ou homosexuelle, ne peuvent ni ignorer la loi, ni se départir des règles sociétales de respect du consentement exprimé de chacun·e.
QUAZAR rappelle que le cœur de l’audience du vendredi 7 septembre était le non consentement à une relation sexuelle, et rien d’autre.
QUAZAR veillera donc tout particulièrement à condamner toute tentative éventuelle de récupération, de discours racistes et xénophobes au sujet cette affaire.
* Prénom de la victime modifié, en vertu du principe de protection de la vie privée des victimes par QUAZAR.
Stéphane Corbin,
référent pôle juridique, défense des droits,
accompagnement des victimes,
de Quazar, Centre LGBT d’Angers